Mémoires de la Faculté des Géosciences et de l'Environnement

Cote: 491
Auteur: TOBLER Sven
Année: Octobre 1999
Titre: Vevey, ville de l'image, et Image de Vevey: Patrimoine et urbanité
Sous la direction de: Prof. Jean-Bernard Racine
Type: Mémoire de licence en géographie
Pages: 102
Complément: 7 fig., 9 annexes
Mots-clés: Géographie urbaine / Patrimoine architectural urbain / Conservation / Fonctions de la ville / Identité / Urbanité / ISOS (Inventaire des sites construits à conserver en Suisse) / Plan directeur communal / Science et sens commun / Comparaison de la gestion du patrimoine architectural / Valsainte (quartier) / Maria Belgia (quartier) / Squatt / Discours performatif / Vevey / Vaud / Suisse
Résumé: Actuellement, on peut constater une crise des villes, qui se traduit par une perte ressentie de l'attractivité de ces dernières, de la qualité de vie urbaine au profit de la périurbanisation. Ancienne ville industrielle, Vevey est particulièrement touchée par ce phénomène. Plusieurs documents (Plan directeur communal 1997, Inventaire des sites construits à protéger en Suisse (ISOS)...) font état d'un besoin de redéfinition, de renouveau de la ville et de ses fonctions. Nous avons voulu interroger cette nouvelle identité, cette urbanité souhaitée de la ville à travers deux cas conflictuels de gestion du patrimoine architectural urbain: le quartier de la Valsainte et l'ancien complexe Ormond, sis à l'angle Quai Maria Belgia / rue de la Madeleine, affecté à l'habitat dans les années 30. Leur seul dénominateur commun semble être le couple patrimoine \"banal\" (=non protégé) /urbanité: Dans le cas de la Valsainte, les autorités soutiennent l'idée d'une réhabilitation; la résistance à la démolition vient d'un long travail de sensibilisation de la part des habitants; la coopérative fondée par ces derniers est sur le point d'aboutir, la situation du quartier est peu attractive sur le plan spéculatif. Dans le cas du quartier Maria Belgia, les autorités militent pour la démolition; la résistance au changement vient de l'extérieur; elle est le fruit d'une réaction spontanée à l'annonce de la démolition; les squatters actuels profitent certes des délais de procédure, mais ne sont pas (et ne se sentent pas) inclus dans un projet ultérieur quel qu'il soit; le site en bordure de lac est très convoité, le quartier, bien que non-protégé, figure dans deux inventaires patrimoniaux. Il nous a paru nécessaire de traiter d'abord les questions d'urbanité et de patrimoine: Ayant constaté la difficulté d'aborder ces objets de manière scientifique en intégrant les réalités des usagers, nous ferons quelques propositions épistémologiques. Puis nous tenterons une définition du concept d'urbanité, qui nous renverra au couple pratiques sociales/formes urbaines. Ensuite, nous nous attacherons à la notion de patrimoine. Et nous verrons vite que le patrimoine construit urbain est mal intégré dans la réflexion urbaine, au niveau des institutions comme au niveau du cadre légal de sa conservation. Il ne s'agit en outre pas d'une notion figée, existant par elle-même, relevant d'une logique immuable, mais il peut être pertinent de considérer ses modalités de production plutôt que les qualités intrinsèques de l'objet patrimonial. Cette façon de considérer le patrimoine comme un produit pose implicitement les conditions de sa production, et le lie, dans la perspective qui nous intéresse, à la problématique de l'urbanité. Nous examinerons donc toute tentative de conservation patrimoniale non pas au vu de ses résultats morphologiques concrets (sorte d'épilogue matériel), mais comme un système d'action, une transaction sociale, impliquant divers acteurs cherchant à faire valoir leur conception de l'urbanité par le biais de diverses stratégies. Nous verrons que ce processus se situe lui-même au carrefour de plusieurs logiques. Nous proposerons ensuite une méthode susceptible d'intégrer cette dynamique dans l'appréhension du patrimoine à travers nos études de cas En conclusion: La \"banalité\" d'une part importante du patrimoine construit n'est pas à mettre sur le compte de son insignifiance, mais résulte d'une mauvaise prise en compte par la cadre légal et institutionnel. Dépasser l'approche morphologique en tentant de prendre en compte les enjeux sociaux liés au patrimoine permet de mettre en évidence que ce sont les forces sociales en mouvement qui élèvent un édifice à la distinction patrimoniale plus que les qualités intrinsèques de ce dernier. Dans ce processus de valorisation, la dimension performative du discours est capitale. Dans ce sens, le patrimoine est une production sociale, dont les enjeux dépassent le cadre de la conservation pour s'inscrire dans le débat actuel autour de l'urbanité, telle que par ex. définie par le Professeur Racine: Qualité d'une organisation urbaine illustrant l'identité d'une ville, sa mémoire, ses conflits, ses changements. Qualité d'un espace ou d'une architecture exprimant ou laissant s'exprimer les projets et les comportements des divers acteurs sociaux. Qualité de pratiques sociales agissant sur l'espace et l'architecture. L'urbanité tend à mettre en relation l'homme et la ville à travers une culture et le génie du lieu. L'urbanité, c'est alors, tout à la fois, le savoir faire de la ville et le savoir vivre en ville. Au niveau communal, la gestion du patrimoine est conjoncturelle et contextuelle, bien que la valeur de ce dernier pour l'identité de la ville, l'image jugée propice à son développement, transparaisse dans des documents tels le plan directeur communal 1997, l'ISOS, la Déclaration de Chillon, tous reconnus par la ville de Vevey.