Mémoires de la Faculté des Géosciences et de l'Environnement

Cote: 548
Auteur: KELLER Silvan
Année: Octobre 2001
Titre: L'appropriation des espaces urbains par les pratiquants de sports de rue: Le cas du roller et du skate à Lausanne
Sous la direction de: Prof. Jean-Bernard Racine
Type: Mémoire de licence en géographie
Pages: 169
Complément: 4 figures, 29 photos, 9 annexes
Mots-clés: Géographie culturelle / Géographie des représemtations / Roller / Skate / Espace public / Urbanité / Sociabilité / Tribu / Identification / Appropriation / Lausanne (ville) / Vaud / Suisse
Résumé: Au cours de ces dix dernières années, la ville occidentale a vu se développer en son sein toute une série d'activités sportives. Ce développement est la conséquence de diverses tendances correspondant à l'évolution sociale récente. Il donne en effet la parfaite illustration de certaines nouvelles valeurs s'imposant de plus en plus dans tout le champ social, telles que la volonté d'évoluer librement sans être soumis à des contraintes extérieures, l'importance des sensations et du plaisir personnel, ou encore l'identification à un (des) groupe(s) d'appartenance. Une certaine frange de ces pratiques sportives urbaines a pris une ampleur particulière à Lausanne, il s'agit du roller et du skateboard. Ces deux activités ont trouvé dans la cité lausannoise un cadre particulièrement propice à leur développement, puisque la pente permet d'y faire de belles descentes et le revêtement des routes et des places est généralement très bon. Elles sont particulièrement intéressantes pour le géographe en ce qu'elles font l'objet de nouveaux usages et de nouvelles perceptions du cadre urbain. Encore trop fréquemment considérées comme des activités informelles et chaotiques, ces nouvelles pratiques sportives demandent que l'on s'y attarde de manière plus approfondie. Il s'avère en effet que leurs divers fonctionnements sont indéniablement la preuve d'une auto-organisation. Celle-ci induit ainsi la présence d'un certain cadre régulateur, lequel est à voir tout autant dans les fonctionnements à l'intérieur du groupe, que dans la relation à l'environnement urbain. Ce cadre n'étant pas fixé de manière rigoureuse et autoritaire, et s'avérant plus implicite qu'explicite, il apparaît aux yeux des pratiquants comme non-contraignant. Toutefois sa présence est essentielle dans le sens où il contribue à la considération et à l'intégration que recherchent les pratiquants. En effet, loin de se poser en opposition avec le milieu dans lequel ils évoluent, mais loin de s'y fondre aussi, les adeptes du roller et du skate s'y insèrent dans un double mouvement de définition des pratiquants par ce milieu et de redéfinition du milieu par ceux-ci. C'est ainsi que nous considérons ces nouveaux sports comme étant producteurs et reproducteurs de l'urbanité, et, par là-même, comme n'étant pas simplement des « sports dans la ville », mais surtout des « sports de la ville ». Notre travail se compose donc tout d'abord d'une partie théorique revenant brièvement sur certains éléments du développement sociétal qui nous semblent essentiels pour comprendre l'émergence récente d'une multitude de nouvelles pratiques sportives - communément regroupées sous le terme de sports fun. Ceci nous permet de montrer à quel point l'évolution du sport suit celle de la société. Sur la base de ce cadre théorique et des différents concepts géographiques et sociologiques auxquels nous avons recours, nous posons une série d'hypothèses de travail abordant les composantes identitaires et spatiales propres au roller et au skate. Afin de pouvoir mettre à l'épreuve ces hypothèses nous procédons, dans le cadre lausannois, à des enquêtes basées sur différentes méthodes qualitatives, à savoir des explorations urbaines, des observations non participantes, des entretiens semi-directifs avec les pratiquants d'une part et les autorités d'autre part, et l'utilisation de « fleurs culturelles » (outil que l'on doit aux psychologues et qui nous permet de saisir, en complément à nos entretiens, comment les pratiquants se définissent et définissent leur sport et l'environnement dans lequel ils évoluent). Finalement, ce mémoire nous permet de définir un rapport à la ville spécifique aux rollers et aux skaters, et entrant en même temps dans un cadre plus large d'évolution sociétale. Cet ancrage dans un phénomène global nous démontre que ces sports représentent plus qu'une mode passagère. Il s'agit donc, pour les autres usagers urbains et, surtout, pour les autorités, de prendre en considération cette approche inédite de la cité, de participer à son intégration et de mettre en valeur sa contribution à la vie urbaine.